En installant un système solaire dans des maternités, la fondation Désirs d'avenir pour la planète, présidée par Ségolène Royal, va faciliter les accouchements de nuit dans trois localités du sud du pays.
Dans la région de Kolda, à l'est de la Casamance, dans le sud du Sénégal, au milieu de cases et des puits où les femmes et les enfants prennent de l'eau, plusieurs dizaines de mètres carrés de panneaux solaires flambant neufs détonnent. Depuis quelques mois, trois maternités des environs – Linkering, Thiewal Lao et Paroumba – bénéficient d'installations solaires pour assurer leur alimentation en électricité. L'opération a été menée par la fondation Désirs d'avenir pour la planète (DAP), fondée et présidée par Ségolène Royal, l'ancienne ministre de l'Environnement française, et qui promeut l'utilisation des énergies renouvelables. Mais les 20 millions de francs CFA (soit environ 30 500 euros) nécessaires à la réalisation de ce projet proviennent d'une manne privée. Il s'agit de l'entreprise de production de coton Géocoton, présente dans cinq pays d'Afrique (Sénégal, Mali, Burkina Faso, Togo et Cameroun) et très implantée localement via sa filiale sénégalaise Sodefitex.
Des "maternités solaires" pour plus de sécurité et de confort à l'accouchement
L'idée des « maternités solaires » est d'utiliser l'énergie solaire pour permettre aux femmes d'accoucher dans des conditions plus décentes, avec le moins de risques possible. Parce qu'ici, comme dans beaucoup de régions d'Afrique de l'Ouest, il vaut mieux ne pas donner la vie après la tombée de la nuit. Faute de moyens, ces trois maternités fonctionnent sans électricité (ou avec peu), rendant le travail des sages-femmes et des matrones difficile, et surtout plus risqué.
« Pour faire sortir les bébés, je bloque une lampe entre mon épaule et ma joue », explique madame Ndiaye, infirmière en chef du centre de santé de Linkering, à 160 km à l'est de Kolda, en mimant la position si souvent répétée. Dans cette pièce, où une femme du village attend son tour, trente-sept autres comme elle en moyenne accouchent chaque mois. « Au Sénégal, la mortalité juvénile s'élève à 56 pour 1 000 par an et la mortalité maternelle, à 237 pour 100 000 par an, indique le docteur Lamine Senghor, adjoint au médecin de Thiewal Lao. Les accouchements sont à 90 % nocturnes, imaginez ce que cela représente lorsqu'il faut les gérer sans lumière. »
Un environnement amélioré pour la conservation des médicaments aussi
Grâce à l'énergie solaire, les trois maternités ont maintenant au moins une ampoule par pièce, ainsi que des ventilateurs, considérés comme un « luxe » dans une région où il fait facilement plus de 40 degrés. « Nous avions de sérieuses difficultés pour travailler, témoigne Khadiatou Diallo, une matrone de Linkering, appuyée sur un aspirateur nasal pour les nourrissons, aussi nouvellement acquis. Maintenant, j'ai retrouvé une vraie motivation dans mon travail. » « Depuis que nous bénéficions de ce système, nous pouvons utiliser l'électricité comme on le souhaite, et cela a un impact immense dans un secteur aussi sensible que la santé », fait remarquer madame Ndiaye, visiblement émue.
Sous une telle chaleur, les médicaments ne se conservent pas. Les équipes médicales ne se risquent pas à faire des réserves si le courant électrique est trop inconstant pour alimenter un réfrigérateur. « On n'ose pas en acheter beaucoup, alors on se retrouve régulièrement en manque », se désole l'infirmière. À Linkering, il fallait débourser 20 000 francs CFA (20 euros) par semaine pour acheter les quatre bouteilles de gaz nécessaires au fonctionnement d'un réfrigérateur. Une somme non négligeable, dorénavant économisée grâce aux panneaux.
Alors, chacun y va de son bon mot. Ces panneaux solaires flambant neufs ? « Un bijou » pour madame Ndiaye, « une merveille » pour le maire de la commune. Mais tout le monde se souvient d'avoir prononcé ces mêmes mots une dizaine d'années plus tôt. À l'époque, une association chinoise avait monté quelques panneaux solaires sur le toit du centre de Linkering. La carcasse ne demeure qu'une simple pollution visuelle, car le système n'a fonctionné que deux ans au plus, personne n'ayant été capable de le réparer.
La question cruciale de la maintenance abordée
La présidente de l'association met un point d'honneur sur la maintenance des panneaux solaires. « Trop de sociétés installent des machines et n'assurent pas le suivi ensuite, affirme-t-elle. Nous ne ferons pas comme elles. Vous devrez en prendre soin. » Pas question de laisser dans le désarroi les 13 000 habitants de la localité de Linkering, 14 000 de Thiewal Lao et plus de 19 000 de Paroumba. Ainsi, deux femmes par maternité doivent être formées par l'équipe de maintenance de la Sodefitex. Mais, pour l'instant, « la façon de procéder n'est pas encore clairement définie, cède Papa Sata Ndiaye, le directeur général de l'entreprise. Il est prévu qu'on leur apprenne à faire l'entretien primaire de l'ensemble du système : nettoyage des batteries, vérification du taux d'humidité dans le lieu de stockage des batteries, etc. L'équipe de maintenance de la Sodefitex prendra le reste en charge. » Le but est d'assurer une durée de vie d'au moins cinq ans pour les batteries et entre vingt et vingt-cinq ans pour les panneaux solaires.
Une deuxième phase du projet prévoit d'équiper d'autres maternités, sans qu'un calendrier soit établi, pour que, de plus en plus, les accouchements sans électricité ne soient plus qu'un mauvais souvenir.
Lepoint