La question préoccupante de la profanation des lieux de culte se pose avec acuité au Sénégal. Ce « phénomène » qui n’était pas connu sous nos cieux a fait une irruption brutale dans l’actualité nationale, devenant ainsi un sujet dans le débat public. Les auteurs de ces actes odieux ont, par le passé, touché tour à tour toutes nos différentes confessions religieuses, et hélas, les évènements ayant frappé la Cathédrale de Kaolack il y a quelques semaines ne font que nous rappeler avec inquiétude et indignation que c’est encore possible. De telles situations dans une sous-région de plus en plus menacée par le péril des extrémismes religieux nous inquiètent. Il est nécessaire que les autorités prennent plus au sérieux cette question par des mesures drastiques contre les profanateurs. En effet, la prise de mesures sévères et dissuasives s’impose pour sanctionner ces nouveaux délinquants ; sans quoi, cela pourrait créer une stimulation chez d’autres qui hésitent encore à passer à l’acte.
C’est pourquoi, la loi doit être appliquée dans toute sa rigueur à toute personne qui serait reconnue coupable de tels gestes, qu’elle soit civile, militaire ou paramilitaire. Il en va de l’avenir du pacte républicain fortement enraciné au Sénégal, pour que nul, quelles que soient les influences, ne puisse le remettre en cause. Cela est d’autant plus nécessaire et important que le contexte international est marqué par la poussée de l’intégrisme religieux; et l’Etat doit veiller à préserver le dialogue interreligieux que nous vivons dans nos familles. Chaque citoyen doit s’investir et prendre ses responsabilités pour le préserver. Ainsi, avons-nous à cœur d’inviter ici les chefs religieux à sensibiliser davantage leurs fidèles sur les valeurs de tolérance, d’acceptation, du respect de l’autre et de solidarité.
Forts de cette conviction et conscients que tout ce que nos aïeuls ont mis des siècles à construire peut être détruit par des forces obscures extérieures, voire intérieures, nous appelons tous les citoyens, toutes confessions confondues à unir nos forces et nos prières pour que l’image de notre pays ne soit pas ternie par des pyromanes dont le rêve ultime est de voir notre cher Sénégal sombrer dans le chaos; un scénario catastrophique contre lequel tous doivent se dresser comme un seul homme pour lui barrer la route. C’est le seul combat qui vaille la peine d’être mené.
Le sursaut individuel et national contre les profanations est urgent car le Sénégal est aujourd’hui un pays salué et reconnu par le monde entier pour son exemple de dialogue et de cohabitation entre les différentes religions. Et cette image, nous la devons d’abord à nos ancêtres qui ont favorisé la co-existence et la fréquentation fraternelles, dans nos familles, entre parents, frères, sœurs, proches … appartenant parfois à des religions différentes; mais nous la devons aussi à la laïcité républicaine qui garantit la liberté religieuse et le vivre ensemble.
C’est dans cette perspective républicaine que nous demandons à l’Etat, qu’au-delà du programme louable de réfection des cités religieuses, des lieux de cultes et de pèlerinages, il veille à ce que nous soyons plus que jamais enracinés dans ce dialogue fraternel qui ,au-delà de la tolérance, est le respect, l’amour et l’acceptation de l’autre avec ses différences.
Vive le Sénégal ! Et vive le vivre ensemble !
Les signataires :
- RAJA/S (Réseau des Anciens Jécistes d’Afrique/Sénégal)
- Des fidèles, Associations et chorales de Sénégalais catholiques de la diaspora (SCAA, USA, France, Angleterre, Italie, Espagne, Canada, Kenya, Benin, Nigeria)