Le terrible drame survenu à Tambacounda, où Bineta Camara, a été selon divers articles de presses, violée et assassinée par un proche de la famille a révélé un visage peu glorieux de la presse sénégalaise.
Les confrères, surtout ceux de la presse en ligne, sans aucune forme de procès, ont désigné dans un premier temps le concierge familial Maodo Malick Diop, puis allègrement P.A.F, bras droit du père de la défunte, comme étant le bourreau de la jeune femme. C’est vrai que les faits et les témoignages tendent à conforter cette hypothèse. Mais il est toujours enseigné dans les écoles de journalisme, de se prémunir de certaines affirmations dans le traitement des affaires judiciaires.
Il est peut-être bon de rappeler, même si tout le monde doit le savoir en principe, qu’avant la condamnation par un juge ou une cours, un mis en cause dans une affaire bénéficie de la présomption d’innocence. Pour l’horrible affaire de Tamba, la vive émotion qu’elle a suscité ne doit pas être une excuse pour la presse.
Condamner ou désigner quelqu’un comme meurtrier sans aucune forme de procès peut se révéler un couteau à double tranchant. Si par extraordinaire, le prévenu est relaxé pour diverse raison, son nom étant déjà trainé dans la boue, il endossera ce poids toute sa vie malgré qu’il soit relaxé.
Course effrénée au scoop
Parce qu’au Sénégal, même si on est relaxé, l’opinion ne retient pas ce dernier aspect. Et ça, la presse doit le savoir. Le terrible fait divers de Tamba et son traitement par la presse doit être un cas d’école. En publiant abondamment la photo et l’identité du présumé meurtrier de Bineta Camara, la presse à déjà prononcé la sentence contre le jeune homme.
A vrai dire, la presse sénégalaise est depuis quelques années, dans une posture inquiétante. S’il faut se réjouir de la démocratisation de l’espace médiatique avec l’avénement d’internet et des sites en ligne, il faut s’inquiéter de l’anarchie qui y règne. C’est comme si les tenants de ces sites ont suivi une autre formation que celle dispensée dans les écoles de journalisme.
Il y a quelques mois, les Sénégalais avaient assisté impuissant, à la diffusion de photos nues, d’enfants siamoises opérées à l’hôpital Albert Royer de Dakar. L’une des filles rendra l’âme quelques jours après l’opération.
Mais apparemment, personne n’a retenu la leçon. On continue de se comporter comme si nous étions dans une jungle. Or, l’éthique et la déontologie sont là pour nous rappeler que l’on ne doit pas faire n’importe quoi. Même pour des raisons d’audience et d’audimat, car en journalisme "tout ne vaut pas tout, tout est hiérachie, choix et tri"
Seulement au Sénégal, voilà. La conscience professionnelle a cédé sa place à une course d'éclats . La profession est gangrenée par des personnes qui n’ont rien à y faire. La nouvelle forme de course au scoop à dynamiter les bases du métier. On ne recoupe plus, de crainte d’être doublé. Et c’est ça le drame de la presse sénégalaise.
ReseauNews