En 2016, un vif débat avait opposé des Constitutionnalistes aux partisans du régime (dont le juriste-tailleur Ismaëla Madior Fall) au sujet de la portée de l’article 51 de la Constitution suite à la saisine du Conseil Constitutionnel, sur le projet de révision de la Constitution incluant la réduction du mandat présidentiel de 7 à 5 ans. Le Professeur émérite Serigne Diop, l’éminent Professeur de Droit Jacques Mariel NZOUANKEU, 45 Professeurs de droit et de nombreux Constitutionnalistes avaient soutenu de manière claire et nette que le Conseil Constitutionnel avait rendu un avis consultatif qui ne liait pas Macky Sall.
Sur son site WEB, le Conseil Constitutionnel, de manière involontaire sans doute, a tranché le débat, en définissant la nature des avis qu’il rend. Dans le cadre d'une consultation obligatoire, le Conseil Constitutionnel fait la distinction claire entre un avis simple (non contraignant) et un avis conforme (contraignant) :
http://conseilconstitutionnel.sn/quelles-sont-ses-attributions-en-matiere-consultative/
En effet, le Conseil Constitutionnel liste les 3 cas de figure, où il est amené à rendre des avis :
Cas n° 1 : Le Conseil Constitutionnel précise que l’article 51 prévoit sa saisine pour avis lorsque le Président de la République décide de soumettre un projet de loi constitutionnelle ou tout autre projet de loi au référendum.
Cas n° 2 : En application de l’article 5, alinéa 1 de la loi organique n°2016-23 du 14 juillet 2016, l’avis conforme du Conseil Constitutionnel est requis, s’il doit être mis fin, avant l’expiration de leur mandat, aux fonctions des membres du Conseil Constitutionnel, sur leur demande ou pour incapacité physique.
Cas n° 3 : Enfin, Le Conseil Constitutionnel précise qu’en dehors de ces 2 cas, l’article 92, alinéa 2 de la Constitution, prévoit qu’il peut être saisi pour avis par le Président de la République.
Nature juridique des avis du Conseil Constitutionnel
A- L'avis prévu à l’article 51 (de la Constitution (cas n°1) est un avis simple qui n’a aucune force contraignante. La consultation est obligatoire, mais une fois l’avis recueilli l'autorité (le Président) est libre de suivre ou non les recommandations. En 2016, le Conseil Constitutionnel a été saisi au titre de l’article 51, sur le projet de révision de la Constitution. La consultation du Conseil Constitutionnel était obligatoire (article 51), mais l’avis ne liait pas Macky Sall.
B- L'avis conforme (cas n°2) lie l'autorité administrative. C’est un avis contraignant qu’on est tenu de suivre (on ne peut pas y déroger). Le Conseil Constitutionnel a donné l’exemple de l’article 5, alinéa 1 de la loi organique n°2016-23 du 14 juillet 2016. Aux termes de cet article, l’avis conforme du Conseil Constitutionnel est requis, s’il doit être mis fin, avant l’expiration de leur mandat, aux fonctions des membres du CC, sur leur demande ou pour incapacité physique.
Conclusion définitive : Le 12 février 2016, le Conseil Constitutionnel, concernant la réduction du mandat présidentiel de 7 à 5 ans, a rendu un avis simple et ni un avis conforme, encore moins une décision.
Le 16 février 2016, lors d’une allocution télévisée, Macky Sall a affirmé aux 16 millions de sénégalais « J’entends me conformer à la décision du Conseil Constitutionnel. En conséquence de quoi, le mandat du Président de la République connaîtra son terme en 2019 ». En liant le terme de son mandat à un avis du Conseil Constitutionnel, qui a été modifié illégalement en décision (les décisions du Conseil Constitutionnel s’imposent à tous et ne sont pas susceptibles de recours), Macky Sall a fait un coup d’état constitutionnel en 2016, avec la complicité passive des 7 Sages qui devaient refuser de cautionner une telle forfaiture (silence coupable d’une extrême gravité).
Il ne s’agit pas de réécrire l’histoire puisque la forfaiture est déjà faite, mais de prévenir et de réaffirmer avec force que les citoyens sénégalais n’accepteront en aucun cas un nouveau coup d’état constitutionnel.
Il ne faut jamais que ce qui s’est produit en 2016 se reproduise au Sénégal. Jamais.
Aucune forfaiture juridique ne sera tolérée en 2024. Il faut être extrêmement clair : il n’y aura pas de 3éme mandat pour Macky Sall (un nouveau coup d’état constitutionnel).
Seybani SOUGOU – E-mail : sougouparis@yahoo.fr
Rappel historique en 2011
Le 18 juin 2011, l’APR de Macky SALL a publié un communiqué d’une extrême violence, intitulé « Combattre le monarque WADE ».
Dans ledit communiqué, il est écrit noir sur blanc : « Il convient d’élaborer et de mettre en œuvre des stratégies de lutte de portée nationale et internationale pour affronter Abdoulaye WADE par la désobéissance civique, et au besoin demander son départ s’il s’obstinait à vouloir perpétrer sa forfaiture.
Vous avez bien lu : non seulement, Macky Sall demandait à tous les sénégalais (aussi bien les nationaux que ceux de la diaspora) de refuser de se soumettre aux lois et règlements, mais plus grave, il appelait au renversement d’Abdoulaye Wade, élu en 2007, dont le mandat n’était pas encore arrivé à terme. Exactement, comme les maliens qui demandent en 2020 le départ d’IBK.
Voici les termes du communiqué du 18 juin 2011 (voir lien ci-dessous)
https://www.leral.net/APR-de-Macky-Sall-combattre-le-monarque-Wade_a16905.html
Lien concernant le coup d’état constitutionnel en 2016
https://ordredesavocats.sn/45-professeurs-de-droit-demontent-lavis-du-conseil-constitutionnel/