POUR FALLOU

17 - Mai - 2018

Les raisons du meurtre :
- Le retard (comme d’habitude) du paiement des bourses ;
- RST des étudiants, autrement dit Resto sans ticket ;
- Le recteur fait appel aux forces de l’ordre ;
- Affrontements (prévisibles), pagaille, panique des gendarmes submergés (une soixantaine contre des centaines d’étudiants affamés, en colère, en furie ;
- Tirs de sommation ou pas, les balles, elles, sont réelles et Fallou est atteint.

C’est une scène de faits divers presque coutumiers dans nos université avec des conséquences dramatiques comme à l’UGB, ce mardi de fumée, de feu et de sang.

Il avait 26 ans. A défaut d’être le plus bel âge, comme on le dit souvent à tort, est sans doute le plus critique. Âge « border Line » entre la sortie poussive d’une adolescence insouciante, et l’entrée brutale dans le monde implacable des adultes. Mariage, premier enfant, l’angoisse de l’avenir, avec la bourse pour seul filet social de survie en attendant le diplôme et l’hypothétique emploi.

Il est mort Fallou, pour avoir voulu manger sans ticket parce que sa bourse était prise en otage par un argentier plus prompt à dilapider les deniers de la République dans des bombances politico-mondaines qu’à payer à temps des étudiants qui vivent, voire survivent, de leurs bourses.

Il est mort Fallou, parce qu’un Recteur a préféré appeler les gendarmes , plutôt que d’informer son ministre pour qu’il paie les bourses avant une catastrophe; il a préféré les gaz et les balles des gendarmes à la fermeture préventive des restos pour s’opposer au Rst.

Il est mort parce que les gendarmes appelés à la rescousse se sont retrouvés en sous effectifs, sous estimant la faim comme puissant moteur de mobilisation, et, paniqué, leur chef de groupe nous dit-on, a tiré pour permettre à ses hommes de se dégager ! A-t-il pensé un instant qu’un étudiant à terre mettrait fin à la furie des étudiants ? Inadmissible ligne de défense pour des hommes supposés formés, aguerris, professionnels quoi ! Une sortie malheureuse d’un ministre abonné aux bourdes, lui qui déclarait qu’il fera tout pour que son président de candidat soit élu dès le premier tour.

Il est mort parce qu’on a préféré sécuriser l’investissement de privés (les restos) que de veiller au confort de centaines d’étudiants pour qui ces restos existent et qui dépendent de minables bourses pour vivre.

Il est mort parce qu’un régime malgré ses bavardages sur « l’année sociale », tel un pyromane, s’amuse avec la paix sociale. Des bourses presque toujours en retard; des engagements et accords pris avec des acteurs sociaux et jamais respectés.

Il est mort Fallou, parce que les partis politiques ont depuis longtemps déserté le terrain social, obnubilés par l’échéance électorale de février 2019.

Il est mort Fallou, parce qu’on a préféré le béton des autoroutes, les Ter et aéroports de prestige, au quotidien et à l’avenir de l’école, l’université, les hôpitaux. Alors que la Cedeao, annonce plus de 7millions personnes affamés dans le Sahel et environ 750.000 au Sénégal - pourtant le régime actuel se bombe le torse en parlant de « récoltes record « !

Il est mort Fallou, parce que pour la survie d’un régime des prédateurs (anciens et nouveaux)on préfère gaspiller les maigres ressources nationales pour l’élection au premier tour d’un président. Il est mort parce que les « gendarmes auraient dû éviter d’utiliser des balles réelles en de pareilles situations » comme le conseille sagement le célèbre commissaire de police à la retraite Boubacar Sadio (Walf de ce mercredi). Parce que, assène-t-il, « l’usage de balles réelles par les forces de l’’ordre en matière de maintien et de rétablissement de l’ordre n’est pas souhaitable. Ce qui a conduit à la mort du jeune étudiant ».

Mais qui autorise nos forces de l’ordre de systématiquement casser du manifestant, de l’humilier dans leurs fourgonnettes et cellules ? Qui prescrit des balles réelles à des agents qui souvent, n’ont aucune expérience pratique du maintien ou du rétablissement de l’ordre. A part balancer des bombes lacrymogènes ou tirer sur les foules ?

Oui, plus que le tireur du jour, le premier responsable du meurtre de Fallou, c’est celui qui a autorisé la fourniture et l’usage de balles réelles à des hommes sous pression !

Balla Gaye, étudiant en droit, 31 janvier 2001, Bassirou Faye, licence de mathématiques et physique, 14 août 2014, et, Fallou Sène, 2ème année de lettres. Macabre liste des victimes innocentes de l’incurie de gouvernements successifs. Tous dits libéraux et néolibéraux !

Pour Fallou, au moins que justice soit faite au nom de Dieu ! Et plus jamais ça ! Basta de ces ministres prompts à défendre les tireurs que les victimes ! Et surtout, un président qu’on préférerait moins généreux en condoléances et plus prévoyant pour éviter la perte gratuite de jeunes vies.

Repose en paix, énième martyr d’une si longue liste macabre !

Demba Ndiaye

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